Conférence
On rencontre sans cesse la présence au sein du pouvoir « souverain » d’un paradoxe redoutable : il est le seul à pouvoir, à la limite, conserver en lui la « naturalité » : un jus contra omnes, et par là il manifeste une auto-présupposition de l’ « être en puissance du droit » où reste présente un « droit naturel », qui refuse d’abord de masquer la relation fondatrice entre violence et histoire. Et pourtant, la relation fondatrice entre puissance et droit ne cesse de faire retour, elle habite le politique comme ce qui est déjà inéluctablement omis, mais toujours nécessairement impliqué à l’articulation pouvoir constituant /souveraineté. Dans le prolongement de cette configuration, on voudrait s’interroger sur les modalités et les fonctions d’un déni de la violence dans le politique – un déni, c’est-à-dire l’exclusion d’une perception insoutenable et sa reconnaissance consacrée, dans le même mouvement ; et la contribution inéluctable au dépérissement de l’hypothèse politique, de la présence massive, sans cesse montrée et amplifiée, de la violence dans un en dehors devenu insaisissable, entre violence « barbare » et violence propre à l’économie du despotisme, entre déchirure événementielle et menace catastrophique jamais vraiment identifiée, entre aberration individuelle et haut mal collectif.
Avec Georges Benrekassa, professeur émérite à l’Université Paris VII – Denis Diderot.
Enregistré le 20 octobre 2011.
Source: http://www.franceculture.fr/limites-du-politique-et-deni-de-la-violence