La démocratie n’est qu’une façade en Algérie.
Mais la contestation reste limitée car le pouvoir est verrouillé par tout un système politique, et pas par un seul homme et son clan.
ENTRETIEN Maître Mostafa Bouchachi, président de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme
« La Croix » : Le président du Conseil de la nation (Sénat) Abdelkader Bensalah entame demain une série de consultations sur des réformes politiques promises par le président Bouteflika. Qu’en attendez-vous ?
Mostafa Bouchachi : Pourquoi vouloir changer des lois puisqu’elles ne sont pas appliquées ? Le problème de l’Algérie n’est pas un problème de texte ou de Constitution, car le pouvoir agit en dehors des lois et affiche son mépris des lois. La démocratie n’est que de façade.
Pour 80 % des textes, le président Bouteflika a légiféré par ordonnance. Il confie au président du conseil le soin de mener des consultations auprès des partis et personnalités, mais Abdelkader Bensalah est membre fondateur du Rassemblement national démocratique (RND), le parti du premier ministre, impliqué dans des fraudes électorales.
Un tiers des membres du Sénat sont désignés par le président. Cette deuxième chambre du parlement ne sert pas à grand-chose sauf à pouvoir bloquer le changement pour la démocratie.
Et c’est ce même parlement qui a amendé la Constitution pour offrir un troisième mandat au président ! Ces annonces de réforme sont de la poudre aux yeux. Personne ne s’y est trompé. L’essentiel pour le pouvoir algérien c’est précisément d’éviter le changement politique.
Amnesty International vient de dénoncer les violations des droits de l’homme en Algérie en 2010. Comment la situation évolue-t-elle ?
Il a y eu des personnes blessées et des arrestations pendant les marches. Les personnes ont depuis lors été relâchées. Même s’il n’y a pas de détenus politiques en Algérie – le pouvoir est trop intelligent pour cela –, la situation des droits de l’homme reste inquiétante.
Le pays est fermé. Il n’y a pas de liberté de rassemblement, ni de constitution de parti ou de syndicat. Et, point omis par Amnesty, la torture est toujours utilisée comme moyen d’arracher des aveux.